The Transat CICI (Lorient - New York)Finir The Transat CIC au pied de la Statue de la Liberté, ça fait quoi ?
Arriver à New York par la mer, ce n’a pas le même charme. Ça fait plus d’effets qu’en avion. Ça restera des souvenirs mémorables. C’est une belle opportunité et c’est magique ! On a beaucoup travaillé pour être au bout de cette transat. J’ai été blessé, on s’est lancé dans un chantier ambitieux, on n’a pas eu le temps de s’entraîner. On a changé beaucoup de choses sur le bateau pour autant on est là. Après, on peut parler du résultat mais l’objectif c’est qu’on soit là, que la confiance soit revenue. C’était important pour moi de reprendre confiance en mon bateau aussi.
Comment avez-vous géré ce retour à la compétition en solitaire après votre accident ?
J’ai beaucoup entendu au début de ma course : sois prudent. Ça a fait son chemin dans ma tête et c’est un sentiment que je n’avais jamais eu : il y avait beaucoup d’appréhension au départ, après tout ce qui m’était arrivé. Comme une prise de conscience soudaine. Finalement, j’étais bien en mer. Je n’étais pas à 100 %. J’étais très prudent, peut-être trop. On peut en juger après. L’important c’est qu’on soit là avec un bateau en bon état. Et j’ai déjà hâte de prendre le retour. Ça me tient à cœur de retraverser le chenal des Sables d’Olonne. Ça voudra dire qu’on est à la veille d’un nouveau Vendée Globe. C’est ce à quoi je rêve et j’aspire depuis des années.
Ça a été une transat dure, comment l’avez-vous vécue ?
C’est ma 16e transat. Ça fait quasiment une tous les deux ans depuis ma naissance… L’appréhension est toujours la même au départ d’une transat. Ce n’est pas anodin de traverser l’Atlantique sur ces machines. Ce n’est pas un simple bateau. C’est très puissant. En plus, c’étaient des conditions contre vents et marées rudes et de voir que le bateau est arrivé est très bon état, qu’on n’a rien abîmé : ce sont de belles choses. J’étais à 40 – 50 % de mon potentiel mais ce qui compte, c’est que la confiance soit là et que je puisse monter crescendo jusqu’au Vendée Globe pour me sentir mieux. Le principal, c’est que j’ai retrouvé ce que j’aime : la compétition et la course au large.
Il y avait de l’appréhension mais y a-t-il eu du plaisir ?
Evidemment. Je ne me suis pas trop pris la tête. J’ai essayé d’oublier un peu cet esprit de compétition. Evidemment, 10e, je ne peux pas cacher une légère frustration parce que ce n’est pas là que j’ai envie d’être. Je pense que j’aurais pu faire mieux si j’y avais mis de l’énergie. Mais j’ai aussi énormément travaillé pendant cette convalescence. Ne rien faire ne me ressemble pas : plus de 80 heures en moyenne par semaine depuis le mois de décembre. Je suis parti sur l’eau épuisé avec pas d’énergie pour la compétition mais seulement celle de retrouver du plaisir.
Avez-vous été plus prudent que nécessaire ?
Il y a un moment les gens à qui on tient répètent de faire attention, psychologiquement, ça commence à être dur. Je pense qu’il fallait montrer que ce qu’on avait mis en place fonctionnait. Je souhaite retrouver le chemin de la compétition au fur et à mesure. C’est merveilleux que je sois là. Personne n’y croyait. Les médecins de la course n’étaient pas très sereins de me laisser partir. Je me suis bateau avec mon entourage pour être au départ parce que ce n’est pas dans mes habitudes de dire : Ok, je laisse tomber. J’ai réussi à la faire. C’est fait. Pour autant les manœuvres sont plus longues, je sens que les automatismes ont un peu disparu. J’ai besoin de retrouver tout ça et passer du temps sur le bateau ; Ce qui compte c’est tout le chemin qui va nous amener jusqu’au Vendée Globe. On va aborder la transat retour avec plus de sérénité et je veux prouver que je peux faire les choses bien. Je ne suis pas prêt à gagner comme je l’étais en Figaro. J’ai un peu perdu cet esprit mais mon objectif c’est de le retrouver bientôt.